Les ratés de la communication

l'exemple des "bijoux de la Castafiore"...

Saviez-vous que l’album d’Hergé « Les bijoux de la Castafiore » était un petit traité de communication ? Ou plutôt devrais-je dire un traité des ratés de la communication…

 

D’un bout à l’autre de l’histoire, ce ne sont que quiproquos, dialogues de sourds, cacophonies et autres « disruptions », pour ne pas dire dérapages.

 

Oui dans cet album où il y a pléthore de personnages, on parle beaucoup, on répète beaucoup (n’est-ce pas Coco)… mais on se comprend peu, voire pas du tout.

 

« Allô, Monsieur Boullu ? Non, ici c’est la boucherie Sanzot »

 

Les messages manquent leur cible. Les cibles en question ne veulent rien entendre.

Ce qui est habituellement la spécialité du professeur Tournesol, ou encore celle des Dupondt, devient le fait de chacun.

 

Les messages partent dans tous les sens. Tout est sens dessus-dessous.

 

Pourtant, Dieu sait si les moyens et outils d’information et de communication sont nombreux dans cette histoire ! Ils se succèdent les uns après les autres et ne font qu’embrouiller chaque situation, au lieu de l’éclairer.

 

Par ordre d’apparition, il y a le courrier, puis le téléphone, le télégramme, la presse papier, la presse télé avec caméras, micros, lumière…

 

Sans oublier le perroquet Coco, vecteur de communication comme un autre - Hergé en a voulu ainsi - puisqu’il est porteur de messages, qu’il répète à l’envi (sans en être cependant responsable).

 

Quant au professeur Tournesol, il se sert d’un cornet pour mieux ne pas entendre.  Et ce déballage de matériel audiovisuel à Moulinsart, notamment les écrans de télévision en noir & blanc, déclenche aussitôt son esprit d’invention.

 

Ça y est, il va mettre au point le « Supercolor-Tryphonar » et tenter de faire passer les images du noir & blanc à la couleur.

 

Superposant les outils aux outils, il crée un mille-feuille de filtres entre le poste émetteur et le poste récepteur. Résultat : le brouillage des images et des messages est complet !

 

Démonstration est faite que ce ne sont pas les outils de communication qui font la communication !

 

Aussi élaborés soient-ils, les outils ne sont que des outils. Ils ne pensent pas à notre place, ne vérifient pas tout seuls leurs sources, n’ont pas le sens de l’éthique, ne mesurent pas l’intérêt de parler ou de savoir se taire. Ils ne garantissent en rien qu’un message transmis sera reçu à l’identique.

 

Il y a toujours cet espace de « jeu » et de liberté, heureusement irréductibles, où se mêlent l’impondérable, le contexte, les interférences, les variantes d’interprétations… et le désir des protagonistes de participer ou non à la mise en scène.

 

 

Autant d’aléas qui font de la communication un art périlleux. Les outils, qu’ils soient du nouveau ou de l’ancien monde, ne font pas de miracles. Mais ils font parler d’eux…

© Freeimages.com/L.Diego Mendez Montero